3 Juillet 2020
Résumé
La France pays viticole historique, cultive la vigne sous différents climats. Si l’effet millésime peut avoir un impact commun dans le pays, il peut s’avérer être spécifique pour telle ou telle région.
Sans préjuger d’une réussite nationale pour 2019, celle du sud-ouest et principalement de Bordeaux, est certaine.
Après un hiver anormalement doux, la vigne se réveille précocement.
Au cours d’un printemps frais, elle perd son avance. Juillet et août sont chauds, parfois caniculaires, et secs. L’état sanitaire est bon. Le beau temps de septembre et début octobre, achève ce cycle presque parfait pour des vendanges dans la sérénité.
2019 est un excellent millésime pour tous les types de vins, « classique et généreux » pour les vins rouges, dans la lignée des 2018 ou des 2015, sans pour cela atteindre le niveau général des 2016.
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Déroulé du millésime
Les premiers pleurs de la vigne apparaissent fin février après un hiver peu rigoureux. Le débourrement intervient précocement fin mars.
Le mois d’avril est contrasté avec quelques gelées le 12 et le 13, un beau temps à partir du 15 puis un refroidissement en fin de mois avec quelques pluies.
Ce temps plutôt frais et humide, continue en mai ainsi que les trois premières semaines de juin avec un ralentissement de la croissance. Malgré ces conditions défavorables et contre toute attente, la fleur se déroule de façon homogène et rapidement entre le 1er et le 5 juin. Et tout cela avec une pression faible du mildiou qui contraste avec 2016 et 2018. L’été s’installe fin juin. Juillet est très ensoleillé (319 h/239 h la moyenne* de 1981 à 2010), caniculaire (30° C moyenne diurne/26° C*) et relativement sec (42 mm/ 50 mm*). Quelques orages épars déclenchent la véraison (changement de couleur des baies) fin juillet.
Août est tout aussi chaud (28°C/ 21° C*), assez sec malgré quelques orages (48 mm/50 mm*) et ensoleillé (268 h/241 h*). L’eau accumulée au printemps a repoussé à la fin du mois d’août le stress hydrique nécessaire à la maturation.
La réussite du millésime se joue en septembre. Comme une course d’obstacles répétés ; tant que le dernier n’est pas franchi, on est sûr de rien.
Le temps sec (33mm/56mm*), exceptionnellement chaud (28°C /21°C*) mais avec des nuits fraiches et relativement ensoleillé (222 h/203*), a contribué à parfaire la maturation des raisins blancs cueillis entre le 26 août et le 15 septembre.
Les pluies opportunes des 9 et 21 septembre ont permis aux merlots de mûrir leurs tanins avant d’être cueillis du 16 eu 25, aux cabernets d’atteindre leur juste maturité et d’être ramassés dans la foulée jusqu’à début octobre.
Dans les A O C de vin liquoreux, le botrytis s’installe tardivement après les pluies de fin septembre. La fenêtre de beau temps du 8 au 15 octobre permet de récolter de jolis lots après un tri rigoureux pour écarter les raisins ou les baies malades (pourriture grise, aigre).
La qualité des vins blancs secs
Comme en 2018, les blancs secs, malgré un été chaud et sec, ont gardé une bonne acidité pour balancer les degrés alcooliques. Très fruités avec beaucoup d’ampleur et de race, les meilleurs, à l’instar des magnifiques 2018, sauront plaire dans l’immédiat et gagneront beaucoup pendant les dix prochaines années pour les crus les plus notoires.
La qualité des vins rouges
L’intensité aromatique fruitée est un caractère commun des vins avec en plus pour certains des notes florales marquées (Pomerol).
Une autre remarque positive tient à la concentration et à la richesse des vins dues à des rendements modérés ou bas. Et ceci grâce à des petites baies, surtout pour les cabernets.
La qualificatif « classique » du titre tient au fait que l’acidité est supérieure à celle de 2018 alors que les degrés alcooliques sont légèrement inférieurs, en moyenne entre 13°, 5 et 14°, 5. Ce qui à terme offrira des équilibres souverains.
Le qualificatif de « généreux » du titre ne tient pas aux rendements qui sont modérés mais à la qualité des tannins. Ils affichent une trame veloutée et suave, même pour les cabernets. En cela, la rive gauche signe de grands vins avec des pourcentages élevés de cabernet sauvignon dans le Grand Vin, assemblés à un merlot réussi. Notamment à Saint-Julien, Pauillac, Margaux, sans oublier Pessac Léognan.
Si le merlot est en beauté rive gauche, ce qui n’est pas toujours le cas(1), il l’est d’autant plus rive droite à Saint Emilion et Pomerol, sa terre d'élection. Et lorsque le cabernet franc l’accompagne en bonne proportion (parfois > 50%), on obtient de très grands vins tout autant que rive gauche.
Ainsi, les deux rives rivalisent de vins magnifiques.
Je cite ci-dessus les grandes A O C qui se vendent en primeur avec une baisse notoire, entre 20% et 30% par rapport aux 2018. Mais je n’oublie pas les A O C plus modestes qui offriront encore en 2019 de Grands Bordeaux Abordables.
Quant au jeu parfois hasardeux de prévoir un avenir aux vins dégustés en primeur en les comparant à des millésimes antérieurs, on ne prend pas trop de risques à comparer 2019 à son prédécesseur ou à 2015, qui tous deux tiennent parfaitement leurs promesses. Quant à rejoindre les plus enthousiastes, propriétaires en général !, qui n’hésitent pas à rapprocher les 2019 de l’opulence des 2009, voire de « la maturité heureuse » des 2005, on attendra que le temps fasse son œuvre pour le vérifier.
La qualité des vins liquoreux
Rescapés de conditions sanitaires difficiles au cours de l’avènement de la pourriture noble, les plus grands crus qui se sont donnés les moyens de trier à la vigne et au cuvier, ont élaboré peu de vin mais du bon voire du très bon tant les raisins possédaient au départ un grand potentiel qualitatif.
(1) Car il n’est pas toujours planté sur des parcelles adaptées
Œnologue-Consultant, critique indépendant, bloggeur
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