9 Avril 2015
Le vendredi 13 février 2015, nous sommes 12 – Primros’wine club, professionnels du vin et grands amateurs - à être conviés par Thomas DUROUX, le directeur général de château Palmer. Malgré le nombre de convives, peu encourageant pour les superstitieux, ce déjeuner restera l’un des plus grands souvenirs du Club.
L’accueil se passe dans la salle de dégustation - un lieu culturel à cloisons amovibles (musique, peinture, photographie (1)) - pour découvrir les 2012. Ils témoignent de cette prouesse des plus grands crus capables de produire d’excellents vins même s’ils ont été conçus dans la douleur d’un millésime difficile (2)
Alter Ego 2012, 51% merlot (M), 40% cabernet sauvignon (CS), 9% petit verdot (PV) (3), un autre Palmer tout en étant un peu le même, comme dans les millésimes. Car on perçoit l’image du grand vin, un peu moins dense, plus souple, plus mûre, moins tannique mais avec la même pureté, la même précision dans la construction. Le maître mot qui les relie, incarnation du cru, c’est la finesse qui, malgré l’immaturité des vins, est néanmoins palpable.
89/100 2018 - 2030
Palmer 2012 (48% M, 46 CS, 6% PV), encore très jeune, ferme - il relève de la mise en bouteille comme le précédent - ne demande qu’à s’épanouir en bouteille. Sa structure nourrie, son fruit frais intense, son acidité de bon aloi, la qualité de ses tanins, augurent du plus bel avenir.
94/100 2025 - 2040
Servi dans la salle à manger du 19ème, le déjeuner est conçu par Seiji NAGAYAMA, un jeune chef japonais à demeure au château, formé dans les plus grands restaurants étoilés.
Le vin blanc de Palmer 2013 (42% muscadelle, 30% sauvignon gris, 28% loset), une production confidentielle débutée en 2007 issue d’une parcelle d’un hectare, hydromorphe (froide, avec des argiles bleues). Le loset (6) n’étant pas autorisé à Bordeaux, oblige la mention « vin de France » sur la contre étiquette. Provenant d’une petite récolte (25 hl/ha), cet assemblage original associé à l’un des plus grands terroirs de Bordeaux et à une vinification rigoureuse (7), livre un blanc sec d’une grande facture.
La pureté, la finesse de l’arôme s’associent à la force, la vigueur de la matière, comme tannique, pour donner une longueur de bouche et une persistance incroyables. Les amateurs ne se sont pas trompés puisque les rares bouteilles sur le marché se négocient autour de 150 €, à la hauteur des plus grands vins secs de France.
93/100 à déguster jusqu’en 2025 (?)
Une trilogie des plus grands millésimes récents d’Alter Ego, intéressante pour voir l’évolution et comparer les styles.
Alter Ego 2005 (53% M, 43% CS), proche de sa maturité,
91/100 à déguster jusqu’à 2025
Ce dernier a le profil d’Alter Ego 2009 (49 CS, 51% M)
91/100 à déguster jusqu’à 2030.
Ils offrent tous deux un agrément immédiat.
Alter Ego 2010 (51% CS, 49% M) est un peu fermé encore. Sa richesse, sa densité, sa force vont lui donner dans quelques années un glorieux épanouissement.
93/100 2018 – 2035
Venant et revenant sur chaque verre, on a pris le temps d’apprécier l’accord remarquable, d’un grand raffinement, avec le plat.
Sur le suprême de poulet de VERTESSEC doré. Chanterelles grises étuvées au jus. Purée d’oignons rouges légèrement acidulée.
Palmer 1989 (52% M, 41% CS, 7% PV). Une certaine opulence du vin est parfaitement contenue par une architecture classique et une bonne acidité. Ses dimensions, sans se départir d’équilibres souverains, le hissent déjà vers des sommets et vont l’y maintenir longtemps.
95/100 à déguster jusqu’à 2040.
Palmer 2000 (53% CS, 47% M). Le vin réunit ce qui dans beaucoup de vin est impossible, le paradoxe d’une grande la finesse et d’une richesse, d’une puissance, sinon d’une profondeur remarquables. Potentiel énorme.
97/100 2020 – 2050
Palmer 1970 (44% M, 31% CS, 16% PV, 9% CF) appartient aux rares grands vins (9) de ce millésime pléthorique à Bordeaux. Sans aucun signe de fatigue, il exprime dans son bouquet et sa flaveur toute la magnificence du terroir de Palmer.
96/100 à déguster sans se presser.
Le poulet à la chair onctueuse et goûteuse à souhait (la cuisson !) est un éperon exceptionnel pour magnifier ces grands vins.
Un superbe vin de paille issu du passerillage (séchage des grappes mûres et non atteintes de pourriture noble sur des claies en bois) du merlot blanc (11) de Palmer. Encore une innovation de Thomas DUROUX pour compléter la gamme « maison » des vins servis au Château par un vin liquoreux. Une barrique seulement produite en 2010, 2011 et 2014.
Le 2010, servi à l’aveugle impressionne l’assistance ; des AOC et des noms prestigieux sont avancés. On est allé droit dans le mur. Je vous souhaite d’avoir la chance, comme pour le blanc sec, de le découvrir.
Robe or jaune éclatante. Le parfum délivre de belles subtilités fruitées et confites associées à noble et boisé noble. Portée par une bonne acidité (on dit fraîcheur aujourd’hui !), la bouche se répand longuement. On ressent, à l’instar des grands liquoreux, une force qui contient la liqueur et donne cette sensation de richesse, d’équilibre, de grande finesse.
Bravo Thomas ! Cet exploit fait réfléchir à la pourriture noble sur pied et les risques insensés que prennent chaque année les vignerons producteurs de vins liquoreux. Car s’il pleut sur le raisin confit, il absorbe l’eau comme une éponge… Gageons que le vieillissement de ce grand vin liquoreux, comme celui du sec, sera à la hauteur du rouge.
Pourquoi ne pas y croire, puisque dans ce domaine, c’est le Terroir qui fait tout…ou presque !
Œnologue-Consultant, critique indépendant, bloggeur
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